Dimension religieuse durant le déclin de l'empire romain

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Au sein de cette société nouvelle qui s'ébauche entre le IIIe et le Ve siècle, période charnière entre la civilisation latine et le monde barbare, l'église assure une sorte de continuité, de transition.

Montée en puissance de l'église catholique

L'église a indirectement bénéficié des malheurs de la Gaule : les désastres accumulés et le naufrage de la civilisation acculaient les hommes au désespoir. Elle en profitera pour faire passer des messages :

  • les barbares sont les instruments de Dieu, châtiant l'égoïsme des riches et la dépravation des moeurs,
  • la Providence enrichit les âmes en abolissant la prospérité,
  • la vie terrestre a un caractère fugace au regard de l'éternité.

Les gallo-romains acceptent la foi chrétienne parce que face aux barbares et à l'anarchie ambiante, elle représente une force et une unité cohérente.

Rôle des évêques

Le christianisme reste la seule structure de l'Empire chancelant grâce au réseau d'évêques reconnu de tous : sous l'emprise de la nécessité, les évêques prennent véritablement le relais des anciens pouvoirs publics en cumulant les fonctions suivantes :

  • il est un chef religieux et spirituel,
  • il assure la défense de sa ville en se substituant à l'autorité défaillante des comtes ou gouverneurs : comme St Aignan à Orléans devant Attila ou Sidoine Apollinaire à Clermont face aux wisigoths,
  • il est un magistrat civil donnant la justice.

Un évêque est nommé dans chaque ville (beaucoup de postes restent toutefois vacants) : leur force réside dans leur capacité à correspondre et à se réunir. Dans les campagnes, la christianisation est nettement moins évidente : il y aura d'ailleurs une assimilation entre les mots "païens" et "paysans".

Autres religions en présence

En plus du Christianisme, deux autres religions sont présentes en Gaule après la chute de l’empire romain :

  • les ariens, représentés par les wisigoths et les burgondes : ils se distinguent des chrétiens car ils ne reconnaissent pas la divinité du Christ (pour eux, ce dernier est un homme, aussi bon soit-il). Leur roi est maître à la fois militaire et religieux, annihilant le pouvoir de la papauté.
  • les païens, représentés par les francs (avant la conversion de Clovis) et certains gallo-romains situés en campagne : ils adorent des idoles et de nombreux dieux liés à chacune de leurs activités (Wotan : Dieu des batailles, Thor : génie de la guerre, Thunar : Dieu du tonnerre).

De nombreux évêques réalisent que leur indépendance n’est pas possible et qu’ils devront composer avec les barbares (ariens ou païens) : nous verrons qu’ils se tourneront vers les Francs, avec un élan qui permettra à Clovis d’obtenir le soutien de la population gallo-romaine.

Les 1ers ermites et le début de la vie monastique

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Les 1ers ermites vont dénoncer l'ambiguïté dont souffre le christianisme :

  • il est l’unique espoir des pauvres et des opprimés : accueil des bébés abandonnés, éducation, orphelinat, hospices, …
  • il reste une perspective de carrière pour les riches sénateurs.

Cette "hypocrisie des chrétiens tièdes" va inciter certains à devenir ermites puis à créer des communautés monastiques pour fuir le monde en menant dans le désert une vie de renoncement et de prière.

Les premiers moines sont des ermites au milieu du IIIème siècle. Paul en 250 sera suivi par Antoine vers 270, qui distribue ses richesses avant de s'isoler dans le désert égyptien dans un tombeau désaffecté puis dans une ancienne forteresse romaine, ou d'autres adeptes le rejoindront. Il mourra à 106 ans et sera le fondateur de la vie monastique en orient. Sa vie a été popularisée grâce à l'évêque Athanase qui l'a rédigée en 370.

Ce phénomène prend surtout de l'ampleur au siècle suivant avec la reconnaissance du christianisme comme religion d'état : auparavant, les chrétiens étaient peu nombreux et risquaient le martyre mais le relâchement qui s'ensuit pousse naturellement certains à rechercher une autre forme de don absolu.

Les ermites, de plus en plus nombreux, vont commencer à partager des repas ou des offices : on passe ainsi de l'ermitisme à une sorte de communauté, dont la première règle de vie communautaire basée sur l'obéissance au supérieur est attribuée à Saint Pacôme qui fonde le 1er monastère vers 320 en Egypte.

Il sera suivi par Basile qui fondera une communauté en 357, par Martin en 372 à Marmoutier près de Tours puis par Cassien qui, après avoir été moine à Bethléem pendant 20 ans, fondera le monastère Saint-Victor à Marseille vers 415.

Saint Torpetius, à l'origine de Saint Tropez

Caillus Silvius Torpetius est officier de l’empereur Néron au 1er siècle après JC. Il rejète de plus en plus les festins et soirées galantes, apanage de l'aristocratie romaine (c'est un comble que la ville soit depuis redevenue au XXe l'endroit préféré des stars !). Sensiblilisé au message des deux apôtres Paul et Pierre, Torpetius déclame sa foi chrétienne et son mépris pour les Dieux païens à Néron. L’empereur ordonne qu'il soit arrêté : emprisonné et torturé, il refuse d’abjurer sa foi et est décapité. Son corps sans tête est déposé sur une vieille barque avec un coq et un chien, symbôles de l’outrage fait à l’empereur. L'embarcation dérive lentement vers l’ouest et finit par s’échouer sur une plage déserte. Les premiers chrétiens recueillent le corps et en font leur Saint Patron. Il donnera son nom au village au Vème siècle : Saint Torpès, puis Saint Tropez à la Révolution.


Photo JFM : panoramique de la baie de Saint Tropez

La légende raconte que le coq s’est envolé sur une rive à quelques kilomètres de là, et a donné son nom au petit village de « Cogolin ».

Saint Denis (IIIe)

Saint-Denis est le premier évêque de Lutèce : venu d'Italie vers 250 en compagnie de 6 autres missionnaires pour apporter la foi chrétienne en Gaule, l’évêque Denis sera martyrisé et décapité à Montmartre.

Selon la tradition rapportée au VIème siècle par Grégoire de Tours, il aurait marché la tête sous le bras jusqu’au village de Catolacus où il se serait effondré et où il sera enterré. Lorsque les persécutions cessent au IVème siècle, une chapelle est élevée à cet endroit et en 475, Sainte Geneviève y fait construire une petite église pour fonder un lieu de culte puis ce lieu sera l'objet de beaucoup d'évolutions :

  • durant la dynastie mérovingienne : Dagobert agrandira le bâtiment et y fondera une abbaye en 625,
  • durant la dynastie carolingienne : Pépin de Bref agrandira l'église. Son fils Charlemagne disait qu'il ne contrôlait le royaume de France qu'avec l'aide de Dieu et aussi grâce à la protection de Saint Denis,
  • durant la dynastie capétienne : Suger refera le devant et le coeur de l'église, donnant ainsi naissance à la basilique de Saint Denis qui sera la nécropole des rois de France et la 1ère église gothique en France. Et Louis VI le qualifiait de "chef et protecteur de la monarchie".

Statue de Saint Denis à
l'abbaye Saint Germain d'Auxerre


Statue du portail de
Notre Dame de Paris

La basilique de Saint Denis sera le lieu de conservation des Regalia, objets utilisés durant les sacres qui se déroulent à la Cathédrale de Reims : couronne, sceptre et épée. Elle abritait également l'oriflamme, qui était remise au capitaine en charge de la campagne militaire à l'occasion d'une messe solennelle.

 

Saint Martin (316 - 397)

En sa qualité de fils de militaire, il sert dans une légion d'élites sous les ordres de l'empereur Constance et se distingue par sa charité : il a, selon la légende, partagé son manteau.

L'évêque de Poitiers l'appelle à l'évêché de Tours en 371 : après avoir converti son diocèse, il fonde le monastère de Marmoutier (Martini Monasterium).

Statue de Saint Martin
à l'abbaye Saint Germain d'Auxerre

Il est notamment à l'origine de la création des paroisses rurales, ce qui a fortement contribué à l'évangélisation du territoire.

Après sa mort en Touraine en 397, il est considéré par les mérovingiens comme l'un des patrons de la Gaule : son tombeau à Tours devient un lieu de pèlerinage et son culte se répand dans tout le pays. Nul autre saint ne sera aussi populaire en France comme en témoigne les 500 communes qui portent son nom ... et plus d'un âne se nommera Martin depuis !

Statue de Saint Martin dans l'église de Verneuil-sur-Seine
(photo prise durant le baptême de mon neveu Rémi !)

Autre page en rapport avec la religion :
Saint Benoit, patron de la chrétienté (sous les mérovingiens)
 
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